Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
La colline aux carlines
18 mars 2010

A consommer sans modération

DSCF4732

Deux cuistots homos, un peu largués, buveurs et fêtards invétérés, abonnés aux petits boulots malgré leur talent certain, se retrouvent une énième fois à la rue. C'est alors que Rickey a une idée de génie, ouvrir un restaurant où tous les mets contiendraient un spiritueux. Dans une ville comme La Nouvelle-Orléans, où l'alcool coule à flots, l'idée est loin d'être saugrenue. Commence alors une course frénétique et épicée à travers les cuisines, les arrière-cours, les bouges et les deals.

Les deux héros, naïfs et gentiment déjantés, sont attachants. On suit leurs pérégrinations au milieu d'un univers de corruption et de petites frappes avec intérêt. L'ambiance étrange de ce roman oscille entre noirceur et jubilation. Mais par-dessus tout, on retiendra les belles descriptions gastronomiques et le monde des cuisines, si particulier. Certes, le vocabulaire est très fleuri, mais il est partie prenante de cet univers survolté, où le "coup de feu" n'est pas un vain mot et où les fortes personnalités s'entrechoquent, voire se déchirent, sans cesse.

Si vous êtes amateurs de bonne cuisine et si vous avez envie de découvrir la cuisine Cajun, ce roman est pour vous.  Quant à moi, je me suis bien délectée dans cette plongée gustative, et j'ai même eu quelques envies de recettes que je testerai peut-être dans ma cuisine, si toutefois je trouve les ingrédients adéquats.

Mise-en-bouche

"Rickey ne se rendait pas compte de l'incroyable potentiel que représentait son idée. En arrivant à la Nouvelle-Orléans Lenny avait été affligé par la quantité d'alcool ingurgitée par les autochtones. Dans n'importe quelle autre ville, les déjeuners arrosés de trois cocktails étaient tombés en désuétude avec la fin des années quatre-vingt. Mais ici, on pouvait s'en enfiler quatre sans que personne ne bronche. L'absorption de grandes quantités d'alcool faisait partie du folklore, au même titre que le catholicisme tape-à-l'oeil, les trois saison de chaleur humide et accablante, l'air des rues chargé de notes amères soufflées dans des trompettes de location par de jeunes mélomanes noirs. Les gens aimaient boire, ici, et ils aimaient prendre du bon temps en buvant."

"Les habitués ne tarissaient pas d'éloges sur les ailes de poulet à la tequila dont la saveur acidulée et bien relevée saisissait  les papilles déjà émoustillées par l'onctueuse sauce au bleu. Les sandwiches Muffuletta* sont désormais agrémentés d'une salade d'olives arrosée de gin."

* Spécialité de La Nouvelle-Orléans, composée de deux tranches de pain italien croustillant garnies de provolone, de salami de Gênes, de jambon Cappicola, le tout nappé d'une salade d'olives : un mélange d'olives vertes dénoyautées, de piments, de céleri, d'ail, d'oignon, de câpres, d'origan, de persil, d'huile d'olive, de vinaigre de vin rouge, de sel et de poivre.

"-Non mais, regarde ça! ordonna Laura en agitant le journal sous le nez d'Anthony. Ils ont cru que j'étais serveuse! Si je voulais servir des plats, je me trouverais un boulot dans un vrai restaurant. Il faut que tu embauches une vraie serveuse, Anthony.

- Attends, Laura, on n'en est pas à ce point-là. On n'a pas besoin d'une serveuse. Je suis toujours là pour t'aider à porter les plats en salle quand il y a du monde.

- Je refuse d'apporter les plats en salle. Je ne suis pas serveuse, putain. Je suis barmaid. Quand les gens commandent à manger, ils commandent à boire. Et moi, je prépare leurs boissons, au cas où t'aurais oublié! Un jour ou l'autre, je vais finir par renverser une assiette chaude sur les genoux de quelqu'un et tu t'en mordras les doigt.

- Mais non, tu ne vas rien renverser. Tu es une bonne serveuse.

- JE NE SUIS PAS SERVEUSE !

- Je sais, Laura, je sais. Je voulais juste te dire que tu te débrouilles bien quoi que tu fasses.

- Tu pouvais pas te contenter de tenir un bar ? reprit Laura, l'air renfrogné Pourquoi tu laisses ces deux blaireaux faire la loi dans ta cuisine ?

- Je croyais que tu aimais bien Rickey t G-man.

- J'aimais bien G-man quand il venait tout seul. Mais je ne peux pas encadrer la grande gueule de Rickey. Tous les deux, ils se poussent au vice mutuellement. Je te jure que je vais pas tenir deux jours de plus à les entendre brailler à travers le passe-plat : "Enlevez, Laura!" Je vais finir par aller en cuisine leur en coller une.

- Mais, c'est comme ça que les cuisiniers causent quand ils sont dans l'urgence. Si tu veux devenir serveuse, il va falloir t'y habituer.

Voyant Laura rouler le journal, Anthony se rendit compte qu'il venait de dire une belle bourde, mais il ne réagit pas assez vite pour esquiver le coup qu'elle lui asséna sur la tête."

"Tanker avait concocté une carte des desserts vraiment épatante dans l'ensemble : il avait sélectionné une série de cocktails incontournables et les avait reconstitués en version solide. Il y avait le "Mint Julep" une coupe en biscuit tuile garnie de deux mousses, l'une saveur chocolat-menthe et l'autre chocolat-bourbon ; l'"Amaretto Sour", une portion de lemon curd relevée d'une touche de liqueur Di Saronno sur une pâte sablée aux amandes ; le "Fuzy Navel", deux demi-pêches au galbe parfait pochées et immergées dans une sauce sabayon au Grand Marnier ; le "Margarita" deux boules de sorbet, l'une à l'orange et l'autre saveur tequila-citron vert, servies dans des verres à cocktail aux rebords en croûte de sucre et garnies d'une cigarette russe nappée de chocolat."

muffuletta_2_2_

CoupeGlacee7_1_

Publicité
Publicité
Commentaires
La colline aux carlines
Publicité
Archives
Newsletter
Publicité